Tour d’horizon du commerce, la situation et les grandes tendances.

 

Atelier animé par Yves Puget, Directeur des rédactions de LSA, pour @GP, journée clients du 30 juin 2022 « La relation client à l’heure du digital »

Nous ne vivons pas une révolution, trop sanglant, ni une mutation, trop long, mais plutôt une transformation, c’est-à-dire que nous continuons à faire ce que nous faisons mais nous faisons également autre chose, et nous le faisons différemment, dans un temps raisonnable, mais il faut le faire.

Pourquoi faut-il changer ?
Quels sont les constats et que pouvons-nous en tirer ?

 

  • Nous sommes en France et la digitalisation inquiète : même si on a tort, c’est un fait.
  • La désertification commerciale est en train de s’opérer dans de grandes villes comme Paris et Londres, des commerces ferment.
  • Le monde est plus complexe, on a l’impression qu’un dirigeant doit être juriste avant tout.
  • L’inflation galope et le pouvoir d’achat diminue.
  • Le dépenses baissent, il y a inflation mais les volumes stagnent, voire baissent, ce qui est pire que la stagflation.

D’une manière générale, la consommation est de plus en plus chaotique, il est difficile de faire des prévisionnels de vente. Nous sommes face à une consommation qui sur-réagit aux médias. Les évènements politiques, économiques influent sur les ventes qui augmentent et descendent très vite et ceci ne va pas s’arrêter. Comme tout est médiatisé, la consommation sera chaotique et erratique. Cela ne veut pas dire qu’elle déclinera mais qu’il y aura des hauts et des bas et que cela va continuer fortement.

Pour pouvoir faire des prévisions, les chiffres également sont difficilement comparables Par exemple, dans le secteur de l’ameublement : au 1er trimestres 2021 on annonce -33% de commandes par internet mais si on compare à 2019 le secteur en est à +20%. Peut-on alors en déduire que le e-commerce dans le secteur du meuble s’écroule ?

Les médias font une surenchère de chiffres dont il faut se méfier. D’après Kantar, il y a une baisse de consommation des produits frais en France mais si on rappelle l’historique, en mai 2021 les restaurants étaient fermés et rouverts en juin 2021. Les méthodes de comparaison ne sont pas toujours les bonnes selon les périodes.

 

Les raisons de rester optimiste

  • Le PIB se porte bien en France
  • Le taux de chômage est bas : 7.2% en avril 2022

 

Pourquoi changer ?
Une entreprise qui ne change pas recule car le consommateur change et ses préoccupations changent.

 

  • Le secteur alimentaire est porté par la natalité
  • La vie familiale est de plus en plus éclatée, il y a de plus en plus de divorces, ce n’est pas bon pour le moral mais c’est bon pour la consommation
  • Le vieillissement de la population est une bonne nouvelle pour la consommation
  • Les préoccupations environnementales sont importantes, surtout chez les jeunes
  • Les gens ont envie de se faire plaisir, envie de se réunir, de partager, on n’est pas que dans une consommation paupérisante, on a aussi envie de se faire plaisir et c’est important. En 2019, 2020, 2021 le meilleur chiffre d’affaires de l’année a été enregistré par Ferrero
  • Les gens veulent du Made in France, du local

Le problème vient du fait que toutes les tendances se croisent et que le consommateur est devenu totalement paradoxal. Il est zappeur, sa fidélité aux marques est de plus en plus faible, il est exigeant, il est digital, il évalue et note tout, il aime être reconnu mais aussi anonyme pour préserver sa vie privée, il est dans la contradiction entre contrainte du pouvoir d’achat et achats plaisir.

 

Pourquoi changer ?
Les fausses raisons pour ne pas bouger dans le commerce.

 

  • C’est trop cher
  • La technologie est trop complexe
  • L’ominicanalité
  • La rentabilité incertaine
  • Trop de projets qui ne servent à rien, exemple des bornes interactives au fond du magasin faites par des informaticiens et qui ne servent à rien
  • Seul le prix bas compte, la techno ne sert à rien
  • Seul le concept compte et tout ira bien
  • Pas besoin d’intelligence artificielle, le flair, l’intuition suffisent, rien ne remplacera le flair du commerçant, de l’acheteur
  • Le personnel fera la différence, un bon sourire emportera la vente

Beaucoup de raisons fausses pour ne pas bouger.

 

Pourquoi changer ?
Parce que la concurrence change

 

  • Est-ce que le cimetière des enseignes est bien rempli : Mammouth, Rallye, Champion, Euromarché ? Les enseignes meurent mais les formats de vente ne meurent jamais.
  • La concentration n’est pas terminée, des enseignes vont disparaître, ce n’est que le début dans le non alimentaire et dans l’alimentaire ce n’est pas terminé.
  • De nouvelles enseignes vont arriver : Google, Amazon
  • Le commerce aujourd’hui est celui de nos lois : la loi Royer a poussé le commerce à la périphérie des villes, c’est vrai dans tous les pays
  • Risque d’ubérisation
  • Les usines à vendre ne marchent plus, les Français n’en veulent plus
  • L’offre trop large ne marche plus, 210 références de pâtes, le consommateur n’y comprend plus rien et pourtant c’est l’innovation qui dope les marchés, on retrouve le paradoxe
  • Trop de messages dans les rayons et pas assez de rationalisation de l’information
  • La promotion est dépassée, promos sur promos qui inondent les boites aux lettres, les Français n’en peuvent plus, il faut la réinventer
  • Les ruptures : un fléau de 4.7 milliards d’euros, est-ce normal d’avoir un taux de rupture aussi élevé et des industriels qui se plaignent d’avoir des ventes qui stagnent ?
  • Des magasins mal tenus qui ne sont pas au niveau
  • Une information mal renseignée ou incompréhensible pour le consommateur sur l’emplacement des rayons

Le secteur change, pour preuve le chiffre d’affaires France 2020 publié en septembre 2021 : Amazon avec 9 milliards de CA est devenu le 1er distributeur non alimentaire en France, il a doublé Leroy Merlin avec 7.9 milliards.

Amazon enregistre une croissance de 16% en 2020 par rapport à 2019, soit 1.3 milliards de plus de CA, ce qui est équivalent au CA de Gamm Vert. En 1 année Amazon a gagné le CA de Gamm Vert !

Dans le même temps, Auchan a perdu 1 milliard qui correspond au CA de H&M France ou de Electro Dépôt.

Ces chiffres inquiètent. Comment une enseigne peut-elle gagner le CA de Gamm Vert en 1 année et une autre perdre celui de H&M en 1 année ? Il y a donc des dynamiques très très différentes dans les enseignes.

 

Les tendances à suivre

 

1 – La vitesse : le consommateur est pressé

  • le passage en caisse doit être rapide
  • les drones sont une solution pour accélérer les livraisons
  • des robots livreurs font gagner du temps
  • l’éloge de la lenteur pour faire face à la vitesse : Carrefour met en place les blabla caisses pour prendre son temps, discuter avec la caissière : le consommateur a le choix, on répond à tous les besoins. Au Japon, des sacs de couleurs différentes permettent de savoir si le consommateur ne souhaite pas être abordé ou si il a besoin d’un renseignement.

2 – Le multicanal : ce qui a changé en quelques décennies, avant on ouvrait un magasin et on faisait du marketing pour faire venir le client, aujourd’hui ça ne marche plus ou moins bien, c’est l’inverse.

  • Le consommateur a envie de consommer tout de suite : au bureau, en voiture avec les drive, à pied il lui faut un magasin, dans son salon il lui faut une market place sur sa tablette… Si le consommateur n’est pas en contact avec son enseigne ou sa marque dans les 5 minutes, il va chez quelqu’un d’autre ou il n’achète pas.

Cela ne veut pas dire que le consommateur ait pris le pouvoir sinon il ne ferait pas la queue pendant des heures pour avoir le dernier i-Phone mais il est pressé et c’est ce qui génère le multi-canal.

  • Le magasin n’est pas mort. La part de marché des hypers et supermarchés est de 74.3% contre 10.7% pour les enseignes à dominante marque propre, 8.9% pour internet et 6.2% pour le commerce de proximité (source KANTAR, 2022).

Parmi les enseignes, Leclerc est toujours en tête avec 22.5% de part de marché en 2022 devant Carrefour 19.7%. Lidl, Aldi, les enseignes de hard discount qui font l’objet d’un emballement médiatique sont toujours aux environs de 10% et pas plus. La progression du hard discount n’est pas aussi importante que ce qui est dit dans la presse.

  • Le clic and collect va se développer fortement, c’est un atout très fort pour les magasins.
  • Le drive a régressé cette année, c’est une invention française qui pose la question de la rentabilité. Le drive d’Ajaccio a le plus gros CA : 24 millions d’euros. Le drive piéton n’est pas simple non plus à rentabiliser.
  • Les casiers, il y en a de plus en plus, vont continuer à se développer.
  • Les magasins automatiques sont un marché de niche, intéressants en entreprise lorsque l’on paye avec son badge.

Les outils de vente dans le multi-canal :

  • Le secteur du e-commerce va se développer : 129 milliards de CA en 2021, +15%.
  • Le M-commerce se développe fortement et représente 22.3% de l’e-commerce
  • Les market places se développent aussi fortement avec 50% du CA par Amazon. Permet d’exploser le nombre de références
  • Les systèmes de livraison vont changer
  • Les magasins sur roues, autrefois de petites épiceries, demain des voitures automatiques

Difficulté pour les enseignes et les marques : la fragmentation des courses et l’explosion des actes d’achat par les consommateurs.

3 – Evolution des grandes surfaces d’alimentation en 3 zones

  • Zone facing pour les produits récurrents à scanner : les achats récurrents sont scannés avec le téléphone portable et le consommateur choisit son lieu de réception : caisse, drive, livraison à domicile
  • Zone d’achats plaisir où l’on prend son temps
  • Zone logistique qui prépare les livraisons à domicile, au drive ou en caisse.

4 – L’évolution des services : la révolution des moyens de paiement

  • Disparition du liquide
  • Les abonnements vont se développer dans les services
  • La prise de rendez-vous pour ne plus attendre
  • Pouvoir réserver ses produits en magasin
  • Prendre des cours en magasin
  • De l’information en rayon qui ne vient pas forcément du packaging mais des vendeurs avec tablettes
  • Des bornes pour aider à la vente et non pour supprimer les vendeurs

5 – Les gains de productivité

  • Les robots pour gagner en productivité
  • L’intelligence artificielle à tous les niveaux de l’entreprise, on n’en est qu’au début
  • Des robots en rayon pour repérer les ruptures
  • La RFID pour les inventaires, Décathlon est très avancé dans ce domaine
  • Les étiquettes électroniques pour transmettre davantage d’informations

6 – Le besoin de savoir

Le consommateur veut tout savoir sur l’historique du produit, sa composition.

La block chain va aider, la NFC aussi mais il va falloir numériser toutes les datas, c’est indispensable et ce n’est pas seulement échanger des fichiers Excel. Il va falloir le faire ensemble, entre industriels et distributeurs. L’évolution de la data produit sur le packaging ne suffit pas car les gens achètent aussi par internet.

Il y a un enjeu énorme dans les relations B to B et très souvent les media ne voient que l’enjeu grand public alors que l’enjeu est B to B. Le grand gain sera B to B.

Le scanning à l’origine, par exemple, servait à accélérer le passage en caisse mais le gros gain du scanning est de collecter la data qui est derrière. Les applis consommateurs comme Yuka et le nutri-score ont poussé les industriels à revoir leur process, une initiative de groupement comme C’est qui le patron a moins de 2% de part de marché mais son impact est sur le B to B en poussant les concurrents à revoir leur façon de travailler.

Le gros chantier de la data est B to B et il y en a pour des années.

 

Quelles sont les technologies qui vont changer le commerce ?

 

  • Les réseaux sociaux jouent le rôle d’informateurs pour organiser son point de vente en fonction des tendances et de l’information qui y circule, le chef de rayon peut organiser son rayon pour éviter les ruptures
  • Le live shopping se développe bien
  • Le commerce vocal va revenir
  • Le rêve d’Amazon est de supprimer l’acte d’achat en anticipant le besoin et en faisant du réapprovisionnement automatique.
  • La reconnaissance d’image : photographier un produit pour savoir quel magasin le propose
  • La réalité augmentée devient réelle
  • Les cabine d’essayage virtuelles, un peu gadget mais se développent un peu
  • L’internet des objets qui communiquent va se développer
  • L’imprimante 3D
  • Le metavers

 

Actualité créée le 4 octobre 2022

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